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Humanité ?

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Futur

Et il ne restera plus qu'une sombre image
Figée à jamais sur ce triste carrelage,
De l'homme disparu, souvenir transparent,
Négatif se projetant éternellement.
Et l'enfant jouant sagement avec sa sœur,
Et la mère cueillant un beau bouquet de fleurs,
Et le père buvant calmement en lisant,
Et le vieillard assis sur un banc, fumant,
Disparaîtront ; seules resteront d'étranges ombres
Ironiques, commémoration des jours sombres
De la guerre atomique, pensée si atroce
De cet être vil à l'esprit bien trop précoce.
Et la pluie arrivant, lavera ce sol noir
De toutes les impuretés des hommes, un soir...
Et le temps lourd qui passe inexorablement
Effacera nos quelques traces. Triste temps !
Et les jours et les nuits alterneront sur Terre,
Et personne ne saura que l'homme si fier,
S'est autodétruit dans un sentiment de haine,
Tuant sa destinée dans d'horribles migraines...

Guerre (libre)

Etouffant brouillard rouge spongieux
Eclairé par un soleil de fer.
Et la mort qui avance en satin sirupeux
Dans ce monde désolé, légué par Lucifer.

Parmi les carcasses pourries de béton
Aux côtes de ferraille rouillée qui accablent et désignent
Le ciel fautif et indigne,
Titube, déambule, une silhouette sans fond.

Derrière ce masque de sérénité,
Elle observe le chien à trois têtes
Qui ronge de son ombre d'acier
Les hommes, ni être ni bête.

Mais elle ne connaîtra jamais
Celui qui porte sur ses grêles épaules de cristal
La voûte du silence éternel et ensorcelé
Qui asphyxie la ville, nécropole de métal.

Déjà, un essaim d'abeilles survole le monde suant la décomposition,
Et le son de leurs gigantesques ailes lépreuses
Brise la mélancolie fiévreuse
De cet air sanglant, chargé du temps, suffocant toute action.

Les étoiles ne luisent plus
Et seront éternellement cachées
Par ce ciel, autrefois bleu crû,
A jamais rouge et foncé.

Les montagnes se prosternent
Devant des météorites qui font fractionner la matière,
Alors que les hommes deviennent lumière,
Face au jet obscène de cet Hydre de l'Herne.

L'homme avance sur cet immondice acide,
D'autres corps informes se déchirent
Et tombent en fanatique lambeaux de cire,
Cliché métaphorique de fraternité insipide.

La lumière tombe en masse honteuse sur ses pas éclaboussés,
N'osant pas éclairer les expressions figées,
Aux yeux remplis d'atrocités pulvérulentes,
Aux corps marqués par le rapace de la guerre dolente.

Cet homme au profil spumeux, à la face aliénée,
S'abstrait alors de ce monde despotique
Que lui avait pourtant confié l'unité morale démocratique
De quelques espoirs phosphorescents de paix.

Mort

Je suis la mort, vêtue de noir, de désespoir,
D'horreur et de chagrin, de joie ou de misère.
Un jour viendra où je vous montrerai le soir,
Cette nuit éternelle, Enfer sans lumière.

Là, les larmes des jeunes filles impures,
Donnent naissance au fleuve sans fond des abysses,
Et l'homme corrompu, de ses entrailles tisse
Le filet de la perte d'un monde si dur.

Chaque jour les portes de cet Eden damné
S'ouvrent, laissant entrer les corps décomposés
Dans ce sombre gouffre, cercueil d'éternité.

Tel est mon travail, telle sera votre peine,
Vous qui n'avez pour seule compagne, la haine.
Je vous attendrai. J'ai le temps. L'Eternité.

Le corbeau

Assis là, immobile, me fixant sans cesse
De ses yeux noirs, reflétant ses pensées,
Le corbeau est sombre, tel un prêtre à la messe,
Et je vole avec lui dans ses visions passées :

Nous parcourons le monde entier comme les mers,
Les guerres comme les famines, mauvais sorts !
Ici, rarement, de pauvres regrets amers,
Là, couramment, l'argent triomphant sans remords.

Le pouvoir se marie avec la destruction,
Et bien que le chômage partout tende ses griffes,
La Mort se déleste de ces vies qu'elle agrafe.

Puis, l'oiseau noir ayant accomplie sa mission,
S'éloigne tel un griffon, silence absolu.
C'est le message de la Mort que j'ai reçu.

Nuit

Quand le jour se meurt, que les ombres disparaissent,
Que le ciel se tait et que les anges s'éclipsent,
Alors, de la Lune et de la Voie Lactée, naissent
Les bruits du silence et le son de tous les vices.

Une, deux, puis des milliards de lumières s'allument,
Ce sont les insectes éblouissants qui éclairent
De leur chaleur interne, le moment et l'heure,
La vie, vêtue d'une pâle étoffe de brume.

Il se crée ensuite l'espace d'une fête :
L'herbe se prosternant, apparaît une scène,
Des orgues de roseaux, et des araignées reines
Qui les font raisonner à en perdre la tête,

Des chœurs de crapauds aux moustiques violonistes,
La Vie et la Mort qui s'enlacent sur la piste,
Et la nature en joie, qui se rit de l'humain
Dormant, qui possède l'humanité en main.

Des gouttes d'eau musicales aux baisers terrestres,
Des étranges danses déchaînées de la Nuit
A l'amour étouffant et sombre de la vie,
Il n'y a qu'un pas, une frontière de l'être,

Un grand saut dans le rêve et dans l'imaginaire,
Qui est pourtant bien réel. Et se perpétue
Cette coutume de la nature, qui, nue,
Se dévoile, depuis des siècles avant notre ère.

Peut-être aurez-vous la chance, une fois, d'entendre,
Ou de voir, la Nuit dans tous ses états de joie.
Vous penserez : " Quelle belle nuit que voilà !
Douce, belle, paisible, et sans rien à comprendre ! "

Les poètes

L'on est si seul, si loin...
Inutile de se cacher dans un coin.
Un monde d'apparences
Où la vie prend un écœurant goût rance...

Vive les différences...
Non, l'on est sujet à l'indifférence
Ou à la moquerie,
Phénomène de cirque dont on se ri.

La façade extérieure
Est plus importante que l'intérieur ?
Nous, au moins, les poètes,
Volons parmi et avec les mouettes.

Trop lourd à supporter,
Trop dur à digérer...
L'on s'isole et l'on crée
Pour la postérité.

C'est de nous que l'on parle et parlera.
Point de vous pauvres mortels, scélérats.
Riez pendant qu'il en est encor temps,
Vous, tas de chair et de sang, trous béants !

*
" La poésie, l'art sera notre seul Salut... "
Tu as raison mon amour. Depuis il a plu...

Triste fleur

Dans le soufre et l'angoisse
D'une vie sans amour,
Marchant là sur des traces,
Sans plus aucun secours,
L'humanité s'enfonce
Dans l'horreur de la mort,
Enlacée à des ronces,
Douce fleur de remords.

Lettre : 13 septembre 1916

Il y a tant de poupées froissée que l'on piétine
Et tant d'âmes perdues dans de sombre comptines,
Que le moindre espoir est une porte fermée,
Obturée par la mort, la serrure rouillée.

Je vois la vie tomber tous les jours dans la boue,
Et la faux cueillir des fleurs rouges dans les champs.
Chaque nuit dans mes rêves, cette vision floue
Me fige et me piège dans un guet-apens.

Et le vent qui souffle dans mes blessures
Ravive la souffrance en horrible torture,
Transformant l'amour en vénérable trésor.

Quand le ciel s'assombrit et le soleil s'éteint,
Je souhaite que tu sois là vêtue de satin
Et de pardon, lorsque je rentrerai du Nord.